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Quel fermier reste si le bailleur loue deux fois ses terres ?

En présence de deux baux successifs, la priorité est donnée à celui dont le bail a été enregistré, dès lors qu’il est de bonne foi.

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L’histoire

Propriétaires de diverses parcelles, Philippe, par acte sous seing privé du 1er juillet 2013, les avait données à bail à Marc, qui les avait mises à disposition de la société civile d’exploitation agricole (SCEA) des Oliviers. Deux années plus tard, par acte du 15 juillet 2015, enregistré le 23 juillet suivant, Philippe avait consenti à l’EARL de Vaubonne un bail rural sur ces mêmes parcelles. Marc, qui ne pouvait se satisfaire de cette situation ubuesque, avait mis Philippe en demeure d’annuler le bail du 15 juillet 2015 et d’obtenir de la société de Vaubonne la libération des parcelles.

Le contentieux

Philippe n’ayant pas régularisé la situation, Marc avait saisi le tribunal paritaire des baux ruraux, auquel il avait demandé d’ordonner l’expulsion de l’EARL de Vaubonne des parcelles objet des deux baux et de condamner Philippe à l’indemniser de son préjudice d’exploitation.

Pour Marc, la cause était entendue. N’était-il pas bénéficiaire d’un bail antérieur à celui consenti à l’EARL de Vaubonne, de sorte que son occupation des parcelles en cause et la mise à disposition de la SCEA étaient bien fondées ?

Ou est-ce au preneur dont le bail a été enregistré auprès du service des impôts, s’il est établi qu’il ignorait, de bonne foi, que les terres étaient déjà louées à un premier exploitant ?

Le tribunal paritaire et la cour d’appel avaient tranché et donné la priorité à Marc et à la SCEA. D’une part, Philippe n’avait pas remis en cause le bail consenti le 1er juillet 2013. D’autre part, au cours des années antérieures à l’entrée sur les parcelles de l’EARL de Vaubonne, Marc avait réglé à Philippe le fermage stipulé à ce bail. Il était donc bien bénéficiaire, sur les parcelles en litige, d’un bail antérieur à celui du 15 juillet 2015. En conséquence, l’EARL devait libérer les parcelles louées à Marc.

Mais saisie par cette dernière, la haute juridiction a censuré la décision des juges d’appel au visa des articles L. 411-4 alinéa 1er du code rural et 1328 du code civil. La cour d’appel aurait dû rechercher si l’EARL, preneuse du bail du 15 juillet 2015, enregistré le 23 juillet suivant, avait connaissance de l’occupation antérieure des parcelles par la SCEA en vertu du bail du 1er juillet 2013 qui n’avait pas été enregistré.

L’épilogue

Devant la cour de renvoi, l’EARL pourra faire valoir que lors de la conclusion de son bail par acte sous seing privé du 15 juillet 2015, elle n’avait aucune connaissance de l’occupation antérieure des parcelles louées par Marc et la SCEA, de sorte que ce bail, enregistré, devait recevoir la pleine exécution. On peut s’interroger sur les raisons qui ont conduit Philippe à consentir, à deux années d’écart, et à deux exploitants différents, des baux successifs sur les mêmes parcelles.

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